Venons en maintenant à un problème très grave : cette guerre que nous a déclaré Daesh :
La création de « Chromophonie Scriptorale » (1990) a été pour moi l’occasion d’une expérience très particulière : celle du rejet (qui dure encore !) d’un mot par toute une partie de la société. Ce mot, c’est celui de « destruction », lorsqu’il est appliqué à la création artistique. En effet, lorsque Yochk’o SEFFER peignit ses tableaux sur mes phrases, il en réalisa de particulièrement violents : ceux, notamment, où le monstre improvisateur déchiquète, en le dévorant, le corps d’une magnifique sirène. Il a voulu signifier, par là, la destruction-transformation d’une magnifique composition-interprétation par l’improvisation. C’est à ce moment que je découvris ce que j’appelai mon premier cycle créateur :
Composition-interprétation / destruction-transformation.
Lorsque Yochk’o SEFFER vit l’effet que produisait ce mot de « destruction » sur ses interlocuteurs, il me demanda de le remplacer par celui beaucoup plus doux de « déconstruction ». Or, le contraire de « construction » est « destruction », et non « déconstruction », qui évoque plutôt une sorte de démontage n’ayant rien à voir avec le terrible tableau en question. C’est pourquoi, voyant cette modification totalement injustifiée, je la refusai, et maintins jusqu’à aujourd’hui le terme de « destruction », tandis que j’entendais et entends encore, autour de moi, le monde politiquement correct se retrancher derrière son piteux Ersatz. J'ai toutefois, depuis, modifié la formulation du cycle créateur en :
Composition-interprétation / destruction-transformation respectueuse.
Pourquoi ces considérations sémantiques à propos de Daesh, me direz-vous ? Mais, tout simplement, parce que Daesh met à nos portes la destruction de l’humanité et parce que ce que personne ne voulait plus entendre présenter comme bénéfique dans le domaine artistique est, maintenant, une épée de Damocles sur nos têtes et sur celles de nos enfants, dans la vie quotidienne, comme si ce mot se vengeait pour ne pas avoir été reconnu à sa juste valeur, car il y a deux sortes de destructions :
- La bonne, la destruction respectueuse : celle, dans le domaine laïque, de l’improvisateur respectueux de l’original dont il part, et qui le met en valeur ; à laquelle correspond, dans le domaine spirituel, celle du véritable islam, qui détruit et transforme les deux Pâques juive et chrétienne, tout en disant de respecter les livres sacrés originaux qui en parlent, à l’égal du coran. Le coran dit, pourtant, le contraire, mais, par là, apporte une ouverture, une respiration indispensables à l’évolution créatrice, comme le montre « Scriptoral ». Il y a, là, une subtilité loin d’être évidente, mais qu’il faut apprendre à gérer (cf. « Impermanence »).
- A côté de cette, non seulement bonne, mais indispensable destruction-transformation respectueuse, source de lumière, non reconnue de nos jours par le monde judéo-chrétien, il y a l’autre, la destruction-transformation irrespectueuse, qui est, plus que mauvaise, détestable et source de ténèbres, à proscrire absolument : celle qui détruit les originaux : celle de Daesh, à laquelle il faut déclarer une guerre, qui ne soit pas d’abord uniquement matérielle et militaire, comme elle l’est actuellement, mais d’abord intellectuelle et spirituelle, ce qui renforcera puissamment la détermination militaire. Il importe que les civilisations judéo-chrétienne et islamique s’intéressent l’une à l’autre, pour découvrir en quoi elles sont complémentaires et ont besoin l’une de l’autre, dans le domaine religieux, comme il importe que, dans le domaine laïque, gauche et droite politiques, destructeurs-créateurs et conservateurs entrepreneuriaux fassent de même, point sur lequel le domaine artistique est en avance, c’est pourquoi il peut servir de terrain d’expérimentation du rapport de ces formes d’esprit.
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