Dans « Le Tao de la Physique » (Editions Sand),
le physicien Fritjof Capra constate que la physique moderne conduit
à une vision du monde très proche de celle des mystiques de tous temps et de toutes traditions,
mais, qu’en Occident,
les écoles mystiques ont toujours eu une fonction marginale,
alors qu’en Orient,
elles constituent le courant principal de la pensée philosophique et religieuse
hindouiste, bouddhiste ou taoïste dont les traits essentiels sont identiques.
C’est pourquoi, il décide, pour plus de simplicité, de parler de
« vision orientale du monde »,
bien que celle-ci ne soit pas limitée à l’Orient.
Ce site présente, sur l’humanité, un point de vue « scriptoral »,
fondé sur le rapport, dans l’évolution créatrice, des formes d’esprit de
composition-interprétation / destruction-transformation improvisatrice respectueuse,
qui se retrouve dans les spiritualités religieuses occidentale et orientale :
judéo-christianisme / islam – Brahma-Vishnu / Shiva…
et dans les spiritualités laïques :
artistiques et littéraires,
entrepreneuriales
(avec la destruction-créatrice de Schumpeter
par rapport au perfectionnement des créations existantes),
politiques,
avec la composition-interprétation « évolutionnaire » de droite
et la destruction-transformation révolutionnaire de gauche…
En conséquence, la question ici posée est :
en quoi se retrouvent, à la lueur de l’analyse de Fritjof Capra, dans « Le Tao de la Physique »,
le comportement des particules et des ondes subatomiques de la physique quantique moderne,
les spiritualités orientales de l’hindouisme, du bouddhisme et du taoïsme
et la spiritualité occidentale de « Scriptoral » ? Retour au menu
1 Science occidentale, spiritualité orientale et Scriptoral
De l'unitaire à l'unitaire, via la dualité objective
La science occidentale part, au VIème siècle av. J.-C.,
des philosophies mystiques des présocratiques proches de la spiritualité orientale :
l’école ionienne, avec les milésiens Thalès, Anaximandre, Anaximène,
nommés hylozoïstes, car ils pensent que la matière est vivante
et, le plus proche de tous, l’éphésien Héraclite, pour qui
« le Feu » est le principe universel,
tous les changements dans l’univers
étant dus à l’interaction dynamique et cyclique des contraires,
le Logos représentant l’unité qui contient et transcende toutes les forces opposées.
Puis, un développement impressionnant de spéculations intellectuelles
la font rompre avec ses origines mystiques unitaires :
cela commença, à la fin du VIème siècle av. J.-C.
avec Parménide d’Élée, pour aboutir, au XVIIème siècle,
via Leucippe, Démocrite, Aristote soutenu par l’Église, à Descartes et à la physique classique avec le modèle mécaniste de Newton - tandis que Dieu imposait, d’en haut, les lois invariables et éternelles de la nature -,
à la dualité de l’âme et du corps, de l’esprit et d’une matière morte et fragmentée à l’extrême,
constituée d’atomes indivisibles, se mouvant dans le vide sans qu’on sache pourquoi,
ce que balaiera la physique moderne, dont Galilée, dès la fin du XVème siècle,
jeta les bases, en combinant connaissance empirique et mathématiques.
Quelques aient pu être les conséquences nuisibles
(crises sociales, écologiques, culturelles, économiques…)
de toutes les fragmentations engendrées par le dualisme cartésien :
esprit/matière, intérieur/extérieur, où le « cogito ergo sum » (« je pense, donc je suis »),
fait naître de la pensée la conscience d’exister, alors que celle-ci s’épanouit dans le vide conceptuel,
force est de constater que le développement de la technologie et de la physique classique,
le dualisme et la vision mécaniste ont amené la science du XXème siècle
à triompher de la fragmentation et à revenir à l’optique unitaire
de la Grèce antique, de l’Orient et d’un Occident marginal. Retour au menu
Réalité indivisible mouvante, vivante, organique, spirituelle et matérielle à la fois
Fritjof Capra montre que,
dans la spiritualité orientale organique,
tous les objets et évènements sont interdépendants,
ce sont les différents aspects d’une même réalité fondamentale.
Le but de l’hindouisme, du bouddhisme et du taoïsme
est de devenir conscient de l’unité et de la corrélation de toutes choses,
de dépasser la notion d’individu isolé et de s’identifier à la réalité fondamentale,
l’émergence de cette conscience étant « l’illumination ».
« Le cosmos apparaît comme une réalité indivisible – éternellement mouvante, vivante, organique, spirituelle et matérielle à la fois. » (Fritjof Capra, Le Tao de la Physique, p. 24.)
« Plus nous pénétrons dans le domaine inframicroscopique,
et plus nous réalisons que le physicien moderne comme le mystique oriental,
en est arrivé à comprendre le monde comme un système
composé d’éléments indivisibles et interdépendants
et en mouvement perpétuel,
l’homme
(en) étant partie intégrante. »
(Fritjof Capra, Le Tao de la Physique, p. 25.)
Scriptoral
est bien une forme de
spiritualité occidentale organique,
puisqu’inhérente à un organisme vivant,
exprimant le double rapport
existant, d’une part, entre « l’oral » et le « script », et,
d’autre part, entre les 2 façons de traiter ce « script » :
par l’interprétation ou par l’improvisation radicale. « L’oral »,
c’est l’énergie-lumière informe de l’inspiration,
le « script »,
c’est la réalisation matérielle qu’engendre cette énergie informe,
les formes qu’elle lui donne, les formes, donc, que lui donne l’informe,
un informe dont le vide est plein de toutes les formes de l’univers.
Cet organisme vivant
est constitué de 4 cycles créateurs composés
de 3 formes d’esprit de composition, d’interprétation et d’improvisation
s’opposant 2 à 2 en 4 temps de
composition-interprétation / destruction-transformation respectueuses I-II / III-IV - V-VI / VII-VIII - IX-X / XI-XII - XIII-XIV / XV-XVI :
En bleu,
la composition-interprétation est évolutionnaire
elle évolue
en élévation verticale.
en restant liée à ses origines. En rouge,
la destruction-transformation est révolutionnaire,
elle évolue
en ouverture horizontale,
en rompant avec ses origines.
Elle est néanmoins respectueuse,
car elle ne s’attaque pas aux originaux,
mais à leur copie, à l’idée qu’elle s’en fait,
à elle-même, en définitive.
Cet organisme vivant est mouvant,
c’est une réalité spirituelle et matérielle,
les 3 formes d’esprit se retrouvant dans le monde religieux :
judéo-christianisme / islam, Brahma-Vishnu / Shiva…
comme dans le monde laïc, plus ou moins matérialiste, artistique, entrepreneurial, politique… une réalité en interaction dynamique et cyclique des contraires, où les cycles créateurs correspondent au cycle des saisons,
avec,
composition-interprétation / destruction-transformation
correspondant à
été-automne / hiver-printemps
passant à 4 reprises du « script » à « l’oral » et de « l’oral » au « script »,
de l’élévation verticale à l’ouverture horizontale contradictoire
et de l’ouverture horizontale à l’élévation verticale,
comme du yang au yin et du yin au yang,
en 16 temps, dessinant
4 arbres de vie latéraux (les formes d'esprit du Coordinateur,
Coordinateur
étant le nom du Principe de Transcendance de Scriptoral et
Principe de Transcendance,
car il transcende les limites en élévation et ouverture de la pyramide classique,
faisant de sa mortelle élévation en fermeture, une vitale élévation en ouverture),
16 temps, dessinant 4 Arbres de Vie latéraux, donc,
le premier, de formation - composition-interprétation / destruction
(printemps - été-automne / hiver :
0 [0 de l'écriture] - I-II-III) :
les 3 suivants de transformations - compositions-interprétations / destructions
(printemps - étés-automnes / hivers :
IV - V-VI / VII ; VIII - IX-X / XI ; XII - XIII-XIV / XV) :
et 1 ARBRE DE VIE CENTRAL (le COORDINATEUR) :
TRANSFORMATION↓↑SCRIPTORAL (XVI↓↑XVII) :
- 4 destructions respectueuses (hivers : III ; VII ; XI ; XV) prennent à contre-sens
les 4 formation-transformations (printemps : 0 ; IV ; VIII ; XII)
et relient les 5 Arbres de Vie par descentes-retours à l'énergie/lumière de l'inspiration ; corrélation et interdépendance, donc,
- la 4ème TRANSFORMATION (XVI), transformation de synthèse, se retrouve en pyramide chutante suspendue au feu central
et provoque,
par l'action du Coordinateur,
Vème Arbre de Vie,
l'apparition de "SCRIPTORAL" (XVII),
la pyramide inversée, tendue par les 4 Arbres de Vie latéraux,
où la lumière s'ouvre en s'élevant et s'élève en s'ouvrant,
une pyramide inversée unitaire en perpétuel mouvement
où l’homme est partie intégrante,
qui pourrait bien correspondre à la Jérusalem Céleste de l'Apocalypse de Jean :
avec pour Principe de Vie transcendant, ce Vème Arbre de Vie,
qui ne dirige pas le monde d’en haut, mais en contrôle
chaque chose, centralement, de l’intérieur : « Celui qui réside en toutes choses, et pourtant est autre que toutes choses ; Celui qu’aucune chose ne connaît, et dont toutes choses sont le corps. Celui qui contrôle toutes choses de l’intérieur.
Il est notre âme, le Maître intérieur,
L’Immortel. » (Brihad-Aranyaka, 3, 7, 15,
cité par Fritjof Capra, Le Tao de la Physique, pp. 24- 25.) Retour au menu
2 Connaître et voir (Fritjof Capra, Le Tao de la Physique, p. 27)
Raison et intuition
Pour Fritjof Capra,
il
existe deux modes de connnaissance ou de conscience : Le mode rationnel ( scientifique),
connaissance inférieure, pour les Upanishad, relative pour les bouddhistes
dont Socrate dit en Occident : "Je sais que je ne sais rien", position paradoxale, ce savoir n'étant pas "rien"
;
c'est le monde de l’intellect qui distingue, divise, compare, mesure,
catégorise
des éléments opposés n’existant qu’en relation les uns avec les autres.
Il procède par Abstraction réduisant les choses à leur profil général,
conformément à la structure linéaire et sérielle de notre pensée et de notre langage.
La communication des expériences et de la pensée se fait par de longues phrases,
donnant une représentation approximative et limitée de la réalité.
En occident, Scriptoral
montre que ce mode rationnel n'est pas seulement scientifique,
c'est, beaucoup plus largement, celui, yang, de la composition-interprétation,
dans tous les domaines de la création, y compris le domaine religieux,
celui qui, représenté en bleu, fonctionne en élévation. L'intellect peut se contenter d'y
"distinguer, diviser, comparer, mesurer,
catégoriser",
lorsque, non inspiré, il crée "à la manière de", et ne fait qu'appliquer des recettes.
Le mode intuitif (mystique ou religieux), connaissance supérieure, pour les Upanishad, absolue pour les bouddhistes
dont Lao-tseu dit en Orient : "Mieux vaut ne pas savoir que l'on sait" ;
c'est le monde naturel, d'une variété et d'une complexité infinies, multidimensionnel, sans ligne ou forme régulière,
où les phénomènes ne sont pas successifs, mais simultanés, où l'espace vide est courbe. Expérience immédiate de réalité indifférenciée, entière, indéterminée,
outrepassant pensée intellectuelle et perception sensorielle et
surgissant dans un état de conscience méditatif ou mystique
.
L'occidental Scriptoral
montre que ce mode intuitif n'est pas seulement religieux,
c'est, beaucoup plus largement, celui, yin, de l'improvisation destructrice-transformatrice,
dans tous les domaines de la création, y compris le domaine religieux,
celui qui, représenté en rouge, fonctionne en ouverture. En témoigne le passage suivant de
"Chromophonie Scriptorale" parlant de l'improvisateur :
"A travers le noir de la cire où longtemps le fixa
le studio son cachot,
(...)
son énergie il rassemble...
et tire de ses racines solaires
l'éclair :
Flash d'improvisation qui le saisit sol-air :
fondant,
dans un même alliage embrassés,
saxophone et -phoniste.
Tête-bras-mains
masse imposante du cuivre :
contrebasse saxophonhomme !
En même temps qu'ancestral archétype,
mousquetaire à sa manière, il devient,
plus que terre qui ne se tait,
Univers :
UN VERS TOUS - TOUS VERS UN"
(...)
En volcanique, son globe-pavillon,
se gravent
de la planète les continents,
tandis qu'usine humaine,
il produit dans ses tubulures au courant éclectique,
avec la lave incandescente des notes - son sang,
d'irradiantes fusées, de filantes étoiles...
qu'en l'espace cosmique
il
projette."
(Nous verrons, qu'apparemment, Fritjof Capra ne conçoit qu'une sorte de créateur :
le créateur tel que Shiva, improvisateur destructeur-transformateur,
et qu'il oublie Brahma, le créateur compositeur, faisant partie d'une trimurti,
dont notre auteur ne parle jamais, l'ayant réduite à deux divinités.) Retour au menu
Raison et intuition : complémentarité Yin/Yang
Pour les chinois,
intuition et raison ont la complémentarité yin/yang,
taoïsme (yin) et confucianisme (yang) sont reliés à ces 2 formes de connaissance.
Elles ne s'excluent
totalement ni à l'Ouest, ni à l'Est : l'élément intuitif, dans la science occidentale, arrive comme une illumination,
en période de relaxation, après une concentration rationnelle intense ; et l'élément rationnel, dans la spiritualité orientale, arrive après l'expérience mystique immédiate, pour l'analyser et l'interpréter, mais avec d'énormes variantes, d’une école à l’autre :
si le Vedanta hindou ou le Madhyamika bouddhiste sont des écoles hautement intellectuelles,
le taoïsme se méfie profondément de raison et logique et le Zen, issu du bouddhisme
se glorifie d’être « sans mots, sans explications, sans instructions, sans savoir », (Cité par Fritjof Capra, Le Tao de la Physique, p.34, Ed. Sand) concentré sur l'expérience de l’illumination,
il n'est que secondairement
(mais secondairement tout de même)
intéressé par son interprétation, estimant que : « A l’instant où vous parlez d’une chose, vous la manquez ». (Cité par Fritjof Capra, Le Tao de la Physique, p.35, Ed. Sand)
C'est pourquoi :
« Celui qui veut comprendre le sens de la nature de Bouddha
doit observer les saisons et l’enchaînement des causes et des effets. » (Tiré de Zenrin Kushu, dans I. Muira et R. Fuller Sasaki. Le Koan Zen, p. 103, cité par Fritjof Capra, dans Le Tao de la Physique, p. 34, Ed. Sand)
Les deux types de connaissance, intuitive et rationnelle,
opèrent dans les deux domaines,
mystique et scientifique.
Le bouddhisme est purement empirique ou expérimental, d’abord,
et l'empirisme du taoïsme constitue le fondement de la science et de la technologie chinoises.
La base expérimentale de la connaissance dans la spiritualité orientale suggère donc
une analogie avec la base expérimentale du savoir scientifique.
En Scriptoral, l'"oral", énergie-lumière de l'inspiration est intuitif
et le "script", toutes les formes et formulations composées et interprétées, qui en naissent,
est d'ordre plus rationnel, tandis que les destructions-transformations respectueuses, nées des compositions-interprétations,
redeviennent intuitives : c'est un nouvel "oral", cf. "ISLAM : FOI EN NOUVEL ORAL",
où l'enchaînement des causes et des effets correspond à celui des saisons,
comme dans le boudhisme, cf. "Les Dix-sept Saisons". Retour au menu
Vision transcendante
Dans les philosophies orientales, l'accent est mis sur la vision, ainsi que le dit le Yaqui Don Juan :
« J’ai une prédilection pour la vision, car c’est seulement en voyant qu’un homme accède à la connaissance » (Tiré deCarlos Castaneda, A separate reality, p. 20, cité par Fritjof Capra, dans Le Tao de la Physique, p. 36, Ed. Sand)
Fritjof Capra précise qu'il ne faut pas prendre cet accent à la lettre :
il s'agit, dit-il, d'un mode de perception qui peut inclure la perception visuelle, mais qui la transcende toujours.
Et là, on retrouve totalement Scriptoral, qui transcende les limites de peinture, musique et littérature,
en transposant
sur les plans picturaux et littéraires, ce qui se passe dans la composition-interprétation / improvisation musicale.
Agissant ainsi, il donne ses musiques à voir et ses peintures à entendre et à comprendre,
connaissances de ses introspections, nées sans machine, de ses racines solaires,
ce qui est réservé à très peu d’individus en des occasions privilégiées.
Dans la physique moderne l'accent est également mis sur l'observation,
mais les expériences sont le fruit d'un travail d’équipe élaboré
et d'une technologie hautement spécialisée.
Elles sont réitérables à volonté.
La différence entre les deux sortes d’observation est donc seulement dans l'approche, non dans la fiabilité ou la complexité :
Il faut
des années d’entraînement pour une expérience mystique approfondie sous la conduite d’un maître expérimenté
et, s'il y a réussite, il est possible de réitérer l’expérience,
ceci étant valable pour Scriptoral, inversant la pyramide du pouvoir créateur,
où l'expérience d'"Impermanence" renouvelle celle des "17 Saisons",
comme pour la spiritualité orientale.
De même, il faut plusieurs années d’entraînement pour réitérer une expérimentation en physique subatomique,
pour poser une question et comprendre la réponse : les
expériences n'étant pas plus uniques les unes que les autres, la complexité et l'efficacité du dispositif technique du physicien étant égalées, voire surpassées, par celles de la conscience mystique.
Scientifiques et mystiques ont développé des méthodes sophistiquées d’observation de la nature inaccessibles aux profanes
(ouvrage de physique, mandalatibétain, pyramide inversée scriptorale).
Une multitude de techniques, précise Fritjof Capra, traditions et formes artistiques
ont été développées pour atteindre ce but : réduire la pensée au silence et faire passer la conscience d’un mode rationnel à un mode intuitif. Ainsi, l'Art oriental (musique, cérémonie du thé, calligraphie) sont des moyens de réalisation de soi
à travers le développement du mode intuitif de conscience méditative,
ce qu'est également l'art occidental scriptoral,
pris comme terrain d'expérimentation
du rapport des formes d'esprit
de composition-interprétation (rationnelle - yang) et d'improvisation radicale (intuitive - yin), cette dernière saisissant immédiatement la nature de la réalité, comme la méditation orientale.
Les scientifiques sont eux-mêmes coutumiers d’aperçus intuitifs lorsque leur esprit est plein d’informations.
Leur intellect est alors réduit au silence, et survient l'intuition dans un état de conscience extraordinaire,
appréhendant directement l’environnement libéré de l'écran de pensée conceptuelle.
Songeons à Archimède, s'écriant hēúrēka - « J'ai trouvé ! » -, en courant nu à travers les rues de Syracuse
Tout près de nous, songeons aussi, au compositeur Paul Arma, qui, en 1976, à 70 ans, se mit à danser lorsque'il résolut,
dans ses "Deux Convergences", le problème que je lui posais : faire jouer ensemble un balafong non tempéré et un saxophone tempéré :
"Deux Convergences" de Paul Arma, 1976,
pour saxophone alto et bande magnétique avec sons percutés et balafong enregistré
« composées pour Alain BOUHEY en témoignage de notre communauté d’esprit » (Paul Arma)
(Cf. synthese.htm et cooperation_m...)
"Celui qui s'adonne à l'étude augmente de jour en jour.
Celui qui se consacre au Tao diminue de jour en jour." (Lao-tseu, Tao-tö king, trad. Ch'u Ta-kao, chap.XLVIII, cité par Fritjof Capra, dans Le Tao de la Physique, p. 39, Ed. Sand)
"L’esprit apaisé du sage est le miroir du ciel et de la terre,
le reflet de toutes choses." (Tchouang-tseu, op. cit. chap. XIII, cité par Fritjof Capra, dans Le Tao de la Physique, p. 40, Ed. Sand) Retour au menu
3 Au-delà du langage (Fritjof Capra, Le Tao de la Physique, p. 47)
Mystiques, science et paradoxe
"La contradiction, si embarrassante pour la pensée courante,
vient du fait que nous devons utiliser le langage pour communiquer notre expérience subjective
qui, dans sa nature véritable, transcende la linguistique." (D. T. Suzuki, cité par Fritjof Capra,
dans Le Tao de la Physique, p. 47 Ed. Sand).
Or, les deux bases de la physique moderne :
la théorie des quanta et la théorie de la relativité. font apparaître clairement que la réalité atomique et subatomique
dépasse la logique classique, qu'il est impossible d’en parler en langage usuel.
les notions courantes étant inapplicables à la structure des atomes.
C'est ainsi, par exemple, qu'en physique atomique, beaucoup de situations paradoxales
sont
liées à la double nature du rayonnement électromagnétique :
il consiste, d'une part, en ondes se propageant sur une grande partie d’espace,
et d'autre part, en particules d'un très petit volume,
d'où le paradoxe. Quand physiciens et mystiques communiquent leur connaissance par des mots,
leurs énoncés sont paradoxaux et pleins de contradictions logiques.
Les paradoxes caractérisent toute pensée mystique
de Héraclite au sorcier yaqui Don Juan.
Ils caractérisent aussi la physique moderne.
Chaque fois que la nature essentielle des choses est analysée par l’esprit,
elle semble absurde ou paradoxale.
Les mystiques l’ont toujours su,
la science le découvre.
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Observation indirecte de la nature
Jusqu’à présent, les lois de la nature
concernaient des phénomènes macroscopiques,
correspondant à une expérience sensorielle :
ce fut le cas de la mécanique de Newton
déduite de la notion macroscopique de boules de billard.
Mais, au XXème siècle,
les
physiciens ont les moyens d’explorer
la nature ultime de la matière :
ils vérifient l'existence des atomes,
découvrent leurs composants : noyaux et électrons,
et
les forces composant le noyau, les protons et neutrons,
avec plusieurs autres particules subatomiques.
Le monde inframicroscopique est rendu accessible à nos sens par des instruments sophistiqués.
Ce qui est vu et entendu, ce n'est pas le phénomène étudié, mais ses conséquences
(le déclic d’un compteur Geiger, le point sombre d’un cliché).
c'est donc une observation indirecte,
et le langage,
qui tire ses images du monde des sens,
est inadéquat.
Plus nous pénétrons profondément dans la nature,
plus nous devons abandonner images et notions du langage courant.
Comme les mystiques, les physiciens s’occupaient d’une expérience non sensorielle de la réalité.
Comme eux, ils devaient affronter l’aspect paradoxal de cette expérience.
"Par suite, continue F. Capra, les modèles et les images de la physique moderne
s'apparentèrent
à ceux de la philosophie orientale." (Fritjof Capra, Le Tao de la Physique, p. 53 Ed. Sand). Retour au menu
Spiritualité orientale et paradoxe
Voyons donc
comment la philosophie orientale
traite les aspects paradoxaux de la réalité,
avant d'envisager la place fondamentale du paradoxe
dans la spiritualité occidentale de Scriptoral.
En Orient,
les Sages font éclater logique et sens commun, - dans l’hindouïsme : par le mythe,
il suffit de voir, dans la Trimurti, la formidable contradiction
qu'apporte le Destructeur-Transformateur Shiva
aux Compositeur et Parfait Interprète : Brahma et Vishnu. - dans le bouddhisme chinois et japonais et le taoïsme, en accentuant les paradoxes
(cf. le Tao Te King de Lao-Tseu),
ainsi le maître Zen Daito dit à l’empereur Godaigo, disciple du Zen : "Nous nous sommes quittés il y a plusieurs milliers de kalpas,
et cependant nous n’avons pas été séparés, ne serait-ce qu’un instant. (… )" - chez les bouddhistes Zen, également, en transformant en vertu les illogismes de communication orale par le système des koan:
ils présentent des énigmes absurdes destinées à faire réaliser les limites de la logique.
Énoncé irrationnel et contenu paradoxal les rendent insolubles par la pensée,
c'est une préparation à une expérience non verbale de la réalité.
Tous ces koan ne permettent, en général, qu’une seule réponse,
qu’un maître compétent reconnaît.
Une fois la solution trouvée, le koan cesse d’être paradoxal,
et devient affirmation profondément significative issue de l’état d’éveil qu’il a contribué à susciter.
En voici un : "Tu peux faire le bruit de deux mains qui applaudissent, maintenant quel est le son d’une seule main ?" (Fritjof Capra, Le Tao de la Physique, p. 51 Ed. Sand). (avec sa résolution ?)
La résolution d'un koan étreint cœur et esprit,
crée une impassementale où le monde devient une masse énorme de doutes et de questions.
Il en va de même pour les situations paradoxales de physique subatomique où se cache la vérité.
La compréhension ne peut pas venir de la logique mais d'une nouvelle connaissance :
celle de la réalité atomique enseignée par la nature qui n’offre que des énigmes, et paraît, de prime abord, totalement absurde en ces expérimentations. Retour au menu
Inversion pyramidale et trou noir
En l'occidentale spiritualité scriptorale,
la contradiction est le moteur de l'inversion pyramidale du pouvoir créateur,
puisque les compositions-interprétations I-II, V-VI, IX-X et XIII-XIV sont contredites
par les destructions-transformations respectueuses III-IV, VII-VIII, XI-XII et XV-XVI,
les destructions III, VII, XI, XV inversant les (trans)formations 0, IV, VIII, XII :
et XVI étant, quant à lui, contredit par XVII :
De même que la résolution d'un koan étreint cœur et esprit,
crée une impassementale où le monde devient une masse énorme de doutes et de questions,
la destruction respectueuse de la composition-interprétation menant à sa transformation, passe par un "trou noir",
réalisant une "imprégnation-oubli de tous les schémas traditionnels", imprégnation-oubli de la logique et du raisonnement,
principaux outils, en Occident, pour énoncer des idées philosophiques ou religieuses :
Il n'y a
possible de véritable improvisation
libérant le flux des images
nouvelles
qu'après
imprégnation-oubli
de tous les schémas
traditionnels
passant par le
"TROU NOIR", pas si noir ainsi que
nous le voyons !
car plein de la blanche ou grise synthèse
de toutes
les couleurs-lumières ou -matières
qu'il laisse le pénétrer, avec en
plus, signe d'amour,
le rouge feu flamboyant.
C'est une île
volcanique
embryon de montagne aux falaises pourtant usées
car beaucoup
pratiquées
(la bonne cuisine toujours dans les vieux pots se faisant
!)
dans l'océan d'une grisaille également chemin du ciel,
mariage
des teintes pour le meilleur et pour le pire :
le noir ou le
blanc,
ou les deux à la fois,
suivant les uns ou les
autres...
La mer s'y fait
mère
qu'ouvre un rocher
jailli des entrailles par-delà les
abysses
où la terre dissimule qui l'embrase et la cache
:
l'énergie du soleil."
La contradiction complémentaire composition-interprétation / destruction-transformation
se retrouve dans tous les domaines de l'activité sociale, et d'abord, dans le domaine religieux :
à la trimurti,
Brahma-Vishnu / Shiva,
de l'hindouïsme oriental, correspond, en Occident,
l'opposition complémentaire, une contre deux, des trois religions du Livre : judaïsme-christianisme / islam. Retour au menu
Koan pour Scriptoral
Avec cet enchaînement spirituel,
nous sommes en face de ce que les bouddhistes orientaux
pourraient appeler un koan, dont la résolution étreint cœur et esprit,
et crée une impassementale où le monde devient une masse énorme de doutes et de questions.
A ce koan, qui fait voler en éclats notre logique, les terroristes (et non les "djihadistes" !) apportent une réponse aussi terrible quesimpliste,
car aucun des "logiciens occidentaux" au pouvoir, n'en donne apparemment d'autre.
Ces contradictions sont si peu évidentes,
que Mohammed ARKOUN, lui-même,
rédacteur de la préface du Coran aux Editions Flammarion, en 1970,
les signalant,
décide, p. 45, de ne plus relever les suivantes,
en déclarant que Muhammad « refait à son gré l’histoire du Peuple de Dieu ».
Ce qu'il faut faire, dans un premier temps,
c'est de reconnaître et formuler le koan.
Pourquoi pas ainsi ? :
"Le Coran détruit et transforme l'essentiel de la Bible et des Evangiles (leurs Pâques),
comment peut-il demander de les respecter à son égal alors qu'il les contredit ?"
Dans ce koan, il y a trois mots à réunir : "détruit", "transforme", respecter",
ils mettent en évidence une valeur nouvelle :
la destruction-transformation improvisatrice respectueuse.
Cette valeur nouvelle
est véhiculée par l’islam depuis le VIIème siècle,
mais ne peut être reconnue en Occident, que maintenant,
grâce aux prestations radicales de certains improvisateurs de jazz contemporain,
nourris de philosophies et de spiritualité orientales.
Elles permettent, à terme, d’inverser la pyramide du pouvoir créateur,
comme le montrent des créations récentes.
En fait, l’improvisateur qui détruit et transforme respectueusement Bach,
ne touche en rien à Bach,
ce qu’il détruit et transforme, c’est l’idée qu’il s’en fait,
ce qui peut être assimilé au vrai Djihad,
par lequel le vrai djihadiste lapide, non pas la femme adultère,
mais son propre désir de lapidation, mutile et décapite, non pas autrui,
mais son propre désir de le mutiler, de le décapiter.
Ce faisant, il se découvre lui-même, renaît à lui-même. C’est pourquoi, qualifier de "djihadistes" les terroristes
insulte ce combat contre les pires des pulsions égocentriques que peut être le djihad,
c’est faire le jeu des terroristes,
comme ne pas reconnaître la valeur de la destruction-transformation respectueuse,
c’est ouvrir la boîte de Pandore des destructions-transformations irrespectueuses,
celles de ces terroristes,
qui s’attaquent de la pire manière à la vie d’autrui au lieu de s’attaquer à eux-mêmes.
Alors : "Le Coran détruit et transforme l'essentiel de la Bible et des Evangiles (leurs Pâques),
comment peut-il demander de les respecter à son égal alors qu'il les contredit ?"
Ce sont précisément ces contradictions qui font toute la modernité de la spiritualité islamique
et tout son intérêt pour la composition-interprétation judéo-chrétienne qui fonctionne en élévation logique
car, par descente-remontée, elles leur apportent l’ouverture improvisatrice.
Si judéo-christianisme et islam savent se respecter
par-delà leur logique et leur contradiction,
ils conjugueront élévation verticale et ouverture horizontale,
ils inverseront la pyramide du pouvoir créateur
et trouveront l'ouverture dans l'élévation
et l'élévation dans l'ouverture :
la Jérusalem céleste...
et n'y seront pas
seuls !