Saxophoniste interprète (de tradition écrite, donc), employé au Sénégal par le Ministère de la Coopération français, je cherchai à faire coopérer musicalement ma tradition écrite avec la tradition orale de mes collègues griots, et cela, en quatre étapes :
Tenter de comprendre la tradition orale,
jouer avec des instruments européens des musiques africaines transcrites dans notre système tempéré (« Piroguiers sangos », « Cérémonie funèbre banzirie »… pièces recueillies par l’ethnomusicologue Herbert PEPPER et adaptées par mes soins),
jouer avec des instruments européens des musiques africaines transcrites en reproduisant, par l’emploi de quarts de tons, le système non tempéré des instruments originaux (« Solo peulh », « Alghaïta et kakaki avec orchestre », « riti, chant, violon, saxophone alto »…)
composer des œuvres, respectant totalement l’intégrité des traditions orale et écrite avec un instrument africain enregistré conducteur (« Les deux Convergences » de Paul ARMA, où un balafoniste peut très bien jouer à l’oreille sur le balafong enregistré non tempéré, en face du saxophone alto jouant sa partition écrite tempérée, en suivant ce même balafong enregistré).
Il s’agit là des débuts (1971-1978) de la recherche « scriptorale », à l’Institut National des Arts de Dakar : la recherche d’une relation évolutive entre l’oral et l’écrit dans le… « scriptoral », mot qui s’imposa à moi en 1976. Elle se poursuivit en France, à partir de 1984, avec la relation entre traditions orale, écrite et improvisée. »
2.- jouer avec des instruments européens des musiques africaines transcrites dans notre système tempéré
(« Negro Spiritual », « Piroguiers sangos », « Cérémonie funèbre banzirie »…
les deux dernières étant des pièces recueillies par l’ethnomusicologue Herbert PEPPER et adaptées par mes soins),
3.- jouer avec des instruments européens des musiques africaines transcrites,
en reproduisant, par l’emploi de quarts de tons, le système non tempéré des instruments originaux
(« Solo peulh », « Alghaïta et kakaki avec orchestre », « riti, chant, violon, saxophone alto »…)
4.- composer des œuvres, respectant totalement l’intégrité des traditions orale et écrite
avec un instrument africain enregistré conducteur
(« Les deux Convergences » de Paul ARMA, où un balafoniste peut très bien jouer à l’oreille sur le balafong enregistré non tempéré,
en face du saxophone alto jouant sa partition écrite tempérée, en suivant ce même balafong enregistré).
"On reçoit une œuvre nouvelle suivant les seules modalités de perception que les œuvres antérieures connues ont façonnées (ainsi, autant qu’à leur substance propre, le caractère des musiques atonales tient-il encore au refus de la musique tonale). Grâce à la plasticité sémantique des formes, des œuvres anciennes restent inépuisables mais sont ressenties, quelque soit notre culture historique, d’une manière inévitablement anachronique, à travers l’évolution qui nous en sépare. De même les emprunts européens à des musiques exotiques (rythmes africains, modes asiatiques…) perdent leur fonction originelle (tels les chants grégoriens issus de danses lascives d’Asie Mineure).
"Paul Arma propose ses « Deux convergences » comme le premier essai d’une véritable « coopération » musicale, en ce qu’elles ne visent pas à nourrir une ethnie avec une autre, mais à faire confluer les traditions respectives de l’Europe et du Sénégal. Elles sont réalisées pour saxophone alto et bande magnétique.
"La bande de la première pièce magnifie l’ampleur des sons graves du piano dans une annonce inexorable et confère à une partie de saxophone alto, en l’abaissant d’une octave, une couleur et une souplesse auxquelles un saxophone baryton n’aurait pu atteindre. Dans le duo du saxophone enregistré et du saxophone vivant plus fébrile, les instruments équivalent à des voix africaines. Celles-ci cependant se superposent, sans balises ni subordination des mouvements de l’un aux tenues de l’autre, en un contrepoint d’une densité insolite.
"La deuxième pièce a enregistré une percussion variée, obsédante et un balafong non tempéré, au diatonisme marqué de l’influence de l’Islam, encore que les formules animées, fluctuantes et inlassables de son jeu laissent dominer un sentiment pentatonique quasi universel, où vient s’adoucir le tour d’adresse du saxophone qui s’y engrène.
"Finalement, en ne cessant de revenir sur le dessin immobile du lit déjà creusé, ces flux sonores rappellent Héraclite : la loi du devenir est la conciliation des différences, loi stable, si bien que « changer, c’est être encore le même ».
Les griots sénégalais de tradition orale pouvant très bien jouer une autre partie sur leur propre musique enregistrée, et l’interprète de tradition écrite que je suis, pouvant très bien jouer une partition écrite sur le même enregistrement que les griots, la recherche scriptorale chercha tout d’abord à unir musiciens de traditions orale et écrite avec un enregistrement conducteur. C’est pourquoi, en accord avec le compositeur Paul Arma, une version des Deux Convergences fut donnée en 1976, à l’hôtel Téranga de Dakar, avec Mamadou Kouyaté à la cora, Bala Doumbouya, au balafong, et Doudou N’Diaye Rose au tam-tam, jouant sur l’œuvre de Paul Arma, ainsi que moi-même, au saxophone alto, Paul Arma étant resté en France.
Ce dernier trouva que cette intégration musicale de la tradition orale dans son œuvre, la déséquilibrait. Il me paraît toutefois très intéressant de voir comment les griots sénégalais ont ressenti ces Deux Convergences. On peut également penser que si cette version avait pu être montée en présence du compositeur, elle aurait pu être équilibrée d’une manière qui lui convenait.
AFRIQUE – EUROPE
FESTIVAL THEATRE, MUSIQUE, DANSE Centre d’Echanges culturels français de Dakar
(13-16 juin 1978)
« Le clou à mon avis de ce festival aura quand même été cette soirée musicale au cours de laquelle on a vu jouer ensemble, sur l’estrade, des musiciens africains et européens. Ces fameuses « convergences » comme on les appelle ont permis la conjugaison à deux genres de musiques différents ouvrant l’ère d’une véritable coopération musicale. » (Mody DIOP, le Soleil, Dakar).
Ce qui précède se passa entre 1972 et 1978 et surtout autour de 1975.
De retour en France en 1978, se produisit, reliant les traditions orale, écrite et improvisée, notamment, ceci :
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