I.- JUIFS, MUSULMANS ET TERRE PROMISE :
L'OPPOSITION BIBLE / CORAN
Il est, dans la République française, un principe fondamental qui empêche de comprendre les évènements dans leur globalité : c'est le principe de laïcité. En effet, séparant l'état des religions, il nous coupe de la compréhension de leurs textes sacrés. Or, ces textes sacrés nourrissent spirituellement leurs croyants et motivent tout aussi fondamentalement les comportements de ceux-ci. Par conséquent, le principe de laïcité est un obstacle à la résolution des problèmes posés par une lecture comparative de ces textes, problèmes susceptibles d'engendrer les conflits majeurs d'aujourd'hui.
Ainsi, chacun sait que Pessa'h, la fête juive de Pâque, est l'une des fêtes les plus importantes de la religion juive, elle commémore la sortie d'Egypte, la fin de l'asservissement des hébreux, la naissance d'Israël en tant que peuple arrivé en Terre Promise sous la conduite de Moïse, Terre promise par YHWH à Abraham dans la Bible :
« C’est à ta descendance que je donne ce pays, du fleuve d’Egypte au grand fleuve, le fleuve Euphrate. » ( Genèse 15:18-21).
Ailleurs, la bible est moins précise :
« J’établirai ton territoire de la mer des Joncs à la mer des Philistins, et du désert au fleuve. » (Nombres 23:20-33).
Les contours de la Terre promise sont donc partagés entre une version maximale et une version minimale. Cette dernière représente la région de Palestine, à laquelle correspondent les territoires aujourd'hui situés à l'ouest du Jourdain qui incluent l'État d'Israël, les Territoires palestiniens et une partie du Royaume de Jordanie, le Liban du Sud et le plateau du Golan. Ajoutons que, d'après la Hagada (rituel récité les 2 premiers soirs de Pessa'h) chaque juif à le devoir de se considérer comme s'il était sorti lui même d'Égypte.
Il est des plus intéressant, maintenant, si nous oublions le principe de laïcité, de voir ce qu'Allah, par la bouche de Muhammad, son dernier prophète, dit dans le Coran, de cette Pâque juive, de ce passage (ce que signifie Pessa'h) de la servitude à la liberté :
« Lorsque vous avez dit : "O Moïse ! nous ne pouvons supporter une seule et même nourriture ; prie ton Seigneur qu'il fasse pousser pour nous ces produits de la terre, des légumes, des concombres, des lentilles, de l'ail et des oignons; " Moïse vous répondit : "Voulez-vous échanger ce qui est bon contre ce qui est mauvais ? Eh bien rentrez en Égypte, vous y trouverez ce que vous demandez." Et l'avilissement et la pauvreté s'étendirent sur eux, et ils s'attirèrent la colère de Dieu, parce qu'ils ne croyaient pas à ses signes et tuaient injustement leurs prophètes. Voilà quelle fut la rétribution de leur révolte et de leurs méchancetés. » (Coran, II, 58, Éditions Flammarion).
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Allah annule donc purement et simplement cette libération et la promesse de YHWH : les hébreux n'ont pas mérité d'arriver en Terre promise, Moïse les a renvoyés en servitude en Egypte et c'est bien ainsi que le comprend Mohamed Arkoun, auteur de la Préface du Coran publié aux Editions Flammarion :
« On voit par cette version sur le retour des Israélites en Egypte que Muhammad refait à son gré l'histoire du Peuple de Dieu. Nous nous dispenserons, à l'avenir, de relever les discordances du Coran avec les livres de l'Ecriture. » (Mohammed Arkoun, Coran, p.45, 4ème trimestre 1970, Éditions Flammarion).
On comprend qu'une lecture au premier degré du Coran, dont tout bon musulman récite quotidiennement les sourates, incite ce bon musulman à croire en toute bonne foi que les juifs n'aient pas leur place en Palestine, qu'ils ne méritent pas la création de l'état d'Israël, et donc que cet état, pour les plus virulents d'entre eux, doive être rayé de la carte, puisque c'est, selon Allah, Moïse lui-même, l'interlocuteur direct de YHWH, qui les en a déclarés indignes.
Par ailleurs, on comprend également que les bons croyants juifs, s'ils lisent eux aussi la Bible au premier degré, forts de la promesse de YHWH de leur donner, au moins, la Palestine, s'y croient en toute bonne foi partout chez eux, y compris hors d'Israël, d'où les colonies israéliennes.
D'où encore, les actuels déchirements d'une guerre qui, si elle n'est pas de religions, est fondée religieusement dans le secret du coeur des peuples.
Forte de son principe de laïcité, qui est un principe de facilité, notre république n'y voit que du feu et laisse à travers les décennies, pourrir une situation qui lui revient en boomerang, jusqu'à menacer le monde occidental d'une troisième guerre mondiale.
Or, il existe, dans nos sociétés laïques, des éléments forts, qui permettent de trouver une solution à cet antagonisme,
d'en dépasser la contradiction, ce sera l'objet de la deuxième page de Paix et Palestine,
intitulée : Bible / Coran : le dépassement de leur opposition, une vérité en soi.
(A suivre...)