Abouhey - le 26/10/2015 à 14h07
Relativement à l’intégration de la communauté musulmane dans l’espace civique français, Pierre Manent ne croit pas à une réforme de l’islam par la République française, mais plutôt en « une démarche indirecte, qui, commençant par accepter avec moins de méfiance certaines mœurs musulmanes, inviterait d’une manière plus pressante les musulmans à participer à la vie nationale », ferait rompre à leur communauté sa dépendance « par rapport au reste du corps arabo-musulman, qui est aujourd’hui traversé de mouvements extrêmement destructeurs ». Cette démarche indirecte n’est pas si difficile que le dit le philosophe, pour peu que l’on adopte un point de vue nouveau s’intéressant à l’esprit des textes sacrés, plutôt qu’à leur lettre, et faisant un parallèle entre les formes d’esprit des mondes religieux et de notre société civile. En effet, l’islam a bien un côté destructeur-transformateur : c’est ainsi qu’Allah, en son Coran, par la bouche de son prophète Muhammad, détruit et transforme les Pâques juive et chrétienne (Moïse n’a pas amené les hébreux en Terre Promise, il les a renvoyés en Egypte, Jésus n’est pas ressuscité, il a été remplacé sur la croix). Toutefois, cette destruction-transformation est immédiatement tempérée par la demande de Muhammad aux musulmans : ne mettre aucune différence entre Bible, Evangiles et Coran (bien que le dernier contredise les deux premiers). La destruction-transformation n’a donc de valeur que si elle respecte l’intégrité totale de ce qu’elle détruit et transforme. C’est là que réside la difficulté, mais cette difficulté n’est pas insurmontable, puisqu’elle est déjà résolue dans la société civile artistique française. En celle-ci, la révolution jazzistique improvisée a contré la composition-interprétation classique, et le jazz contemporain montre que ses improvisateurs peuvent aller jusqu’à détruire et transformer les meilleurs compositeurs sans attenter moindrement à leur existence, au contraire, en les mettant en valeur. Pourquoi ? parce qu’ils ne s’attaquent pas à l’original, mais à une copie, à l’idée qu’ils s’en font, c'est-à-dire, à la limite à eux-mêmes. Les improvisateurs CO-EXISTENT de la manière la plus conviviale avec les compositeurs-interprètes, qu’ils peuvent aller jusqu’à détruire et transformer, établissant avec eux la relation : composition-interprétation / destruction-transformation respectueuse, à laquelle correspondrait judaïsme-christianisme / islam, à l’instar de la relation qui existe déjà dans la trimurti indoue : Brahma, le Compositeur – Vishnu, le Parfait Interprète / Shiva, le Destructeur-Transformateur. Voilà, ce qui, me semble-t-il, pourrait combler ce voeu de Pierre Manent : « inviter d’une manière plus pressante les musulmans à participer à la vie nationale », à s’intégrer, dans le sens de l’évolution créatrice, dans notre communauté, pour la compléter spirituellement et lui donner tout son sens, en respectant ceux qui la constituent jusqu’à présent, car, comme le souligne le philosophe : « l’islam en entrant dans la communauté nationale, est entré dans une nation de marque chrétienne où les juifs jouent un rôle éminent et où l’islam vient d’arriver », et en montrant au corps arabo-musulman destructeur irrespectueux, ce qu’est le véritable islam.
Réaction de Monsieur Pierre Manent à ce commentaire :
"Cher Monsieur,
Je vous remercie beaucoup pour ce commentaire fort intéressant.
Bien à vous,
Pierre Manent"
